27/04/2010

manifestation antifasciste le 10 avril dernier à lyon

« si je ne peux pas danser,
ça ne sera pas ma révolution »


« Adresse à ceux qui se croient normaux
Vous ne vous sentez pas oppresseurs. Vous baisez comme tout le monde, ça n'est pas votre faute s'il y a des malades ou des criminels. Vous n'y pouvez rien, dites-vous, si vous êtes tolérants. Votre société – car si vous baisez comme tout le monde, c'est bien la vôtre – nous a traité comme un fléau social pour l'Etat, l'objet de mépris pour les hommes véritables, sujet d'effroi pour les mères de famille.
Les mêmes mots qui servent à nous désigner sont vos pires insultes.
Avez-vous jamais pensé à ce que nous ressentons, quand vous mettez à la suite ces mots : «salaud, ordure, tapette, pédé» ? Quand vous dites à une fille : « sale gouine » ?
Vous protégez vos filles et vos fils de notre présence, comme si nous étions des pestiféré-e-s.
Vous êtes individuellement responsables de l'ignoble mutilation que vous nous avez fait subir en nous reprochant notre désir.
Vous qui voulez la révolution, vous avez voulu nous imposer votre répression.
Vous combattiez pour les noirs et vous traitiez les flics d'enculés, comme s'il n'existait pas de pire injure. Vous, adorateurs du prolétariat, avez encouragé de toutes vos forces le maintien de l'image virile de l'ouvrier, vous avez dit que la révolution serait le fait d'un prolétariat mâle et bourru, à grosse voix, baraqué, roulant des épaules. Savez-vous ce que c'est, pour un jeune ouvrier, que d'être homosexuel en cachette ? Savez-vous, vous qui croyez à la vertu formatrice
de l'usine, ce que subit celui que ses copains d'atelier traitent de pédale ?[…]
Nous disons ici que nous en avons assez, que vous ne nous casserez plus la gueule, parce que nous nous défendrons, que nous pourchasserons votre racisme contre nous jusque dans le langage. Nous disons plus : nous ne nous contenterons pas de nous défendre, nous allons attaquer.
Nous ne sommes pas contre les « normaux », mais contre la société « normale ». Vous demandez : « Que pouvons-nous faire pour vous ? »
Vous ne pouvez rien faire pour nous tant que vous resterez chacun le représentant de la société normale, tant que vous vous refuserez à voir tous les désirs secrets que vous avez refoulés. Vous ne pouvez rien pour nous tant que vous ne faites rien pour vous-mêmes. »

Front Homosexuel d'Action Révolutionnaire, avril 1971


Antifa, c'est pas un truc de pédé???
Si nous avons choisi de manifester aujourd’hui c’est en ré-action, aux racismes d’état, aux dérives identitaires, au retour aux sacrosaintes valeurs familiales, à l’islamophobie ambiante, aux relents vichyistes de l’état, au négationnisme, à l’hétéropatriarcacapipitaliste, à la xénophobie, à peine voilés qui envahissent nos quotidiens; mais aussi contre la lesbophobie, le patriarcat, l’homophobie, la transphobie, la glorification de la binarité de genre, l’abolitionisme, ou encore le sexisme qui sclérosent nos milieux.
Si nous sommes là aujourd'hui, à défiler en rose dans ce pink bloc non-mixte trans-pédés-gouines-meufs féministes, c'est que nous en avons assez d'être invisibilisé-e-s dans toutes les luttes si, à chaque moment, nous ne réaffirmons pas nos déviances. Nous en avons assez d'être taxé-e-s d'« hystériques » quand nous signifions notre ras-le bol des hétéroflics, (une façon de décrédibiliser et de dépolitiser (et de manière sexiste) nos luttes et nos oppressions quotidiennes), d'être traité-e-s avec la condescendance paternaliste réservée à ce qui serait une « sous-lutte ».
Oui, nous sommes « ghetto », parce que nos identités font partie intégrante de nos vies, de nos luttes. Elles nous ont construit-e-s, nous ne pouvons pas mettre ce que nous sommes au placard.
Nos identités et nos modes de vie sont politiques, du simple fait que ça ne va pas de soi.
Quand vous nous demandez de laisser ce que nous sommes au placard au nom d'une unité – mais quelle unité ? – une unité reproduisant en son sein les mécanismes et les normes qui nous oppressent dans votre société. Avez-vous conscience que vous niez notre existence même en essayant de nous faire correspondre au modèle du « bon militant », pour qui genre, sexualité, (et tant d'autres...) ne relèvent que de l'intime.
Nous avons été invisibles trop longtemps pour ne pas vouloir rester dans le placard.

« votre intégration, c'est la désintégration de nos passions. »

- Un jeune transpédégouine sur quatre a déjà tenté de se suicider (treize fois plus que chez les jeunes hétéros)
- En France, une femme meurt tous les deux jours suite à des violences conjugales.
- Dans le monde, une femme meurt toutes les sept minutes suite à un avortement clandestin.
- La transidentité est toujours officiellement considérée comme une maladie mentale (malgré les déclarations de Roselyne Bachelot...) et tous les trois jours une personne trans' est assassinée dans le monde. (Trois assassinats par mois aux
Etats-Unis)
- En France, pour pouvoir changer de papiers d'identité, les personnes trans' doivent se soumettre à une stérilisation.
- 91,2 % des victimes de viols sont des femmes et des filles
- 99 % des agresseurs sont des hommes et 90 % des agresseurs sont des pères de famille.
- 1 femmes sur 3 est victime au cours de sa vie de viol, violences ou agressions sexuelles.
- Dans le monde, toutes les 45 secondes une femme est violée.
- Combien de NON jamais entendu ?
- Et seulement 6% des agressions sexuelles sont déclarées à la police.
- Et combien d'entre nous, violé-e-s, tabassé-e-s, humilié-e-s, insulté-e-s, assassiné-e-s ?

Et combien de fois va-t-on entendre, aujourd'hui encore, de « sale pute », « sale pédé », « enculé » (…) ?

Nous, trans-pédés-gouines-meufs féministes, mais plus encore, fems, séropos, butchs, avortées, putes, salopes, psychiatrisées, asexuel-le-s, trav', trans', folles, femmes, filles, kinkies, hystériques, et autres « fléaux sociaux », reprenons
la rue, fièr-e-s et en colère !


Lyon, le 10 avril 2010